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Dossier : De 1992 à 2002, l’arrivée de la crise

dimanche 4 août 2002, par Romain Luperini

L’histoire d’amour entre le basket français et le grand public n’est qu’une succession de rendez-vous manqués.

- Article réalisé par Tourtoulou François pour Basket Info.

Tout d’abord les JO 92, la Dream Team débarque sur le vieux continent. La vague NBA déferle auprès des ados français, les principales marques voient dans cet effet de mode un excellent moyen de communication notamment par le bais de tournoi 3x3 parrainé par des joueurs NBA (j’ai eu la chance d’assister à la finale du tournoi Nike où Sonko et ses potes ont gagné le droit d’évoluer avec Zo Mourning , Oliver Miller, Doug Christie, Tim Hardaway et Clarence Weatherspoon face à une sélection de joueurs de Limoges, Pau et Antibes devant 15 000 personnes en folie à Bercy).

L’année d’après, Limoges, à 20h30 sur Antenne 2, décroche lors d’une finale inoubliable le titre de champion d’Europe. Mais voilà, la fédé ne contrôle plus rien et décide qu’en France si on veut faire du basket il faut passer par elle. Les marques arrêtent alors les tournées de 3x3. Dans les clubs, les infrastructures sont insuffisantes et nombre d’enfants qui voulaient s’inscrire sont obligés de repartir faire du foot par manque de place. 1er rendez-vous manqué.

En 95, l’équipe de France pour un rebond pris par le grec Fassoulas se voit privée de mondiaux à Toronto. L’Euro 97 sera marqué par une succession de forfaits des cadres et sera finalement qu’un pénible chemin de croix. Pourquoi revenir sur ces compétitions ? Tout simplement parce qu’elles coïncident avec l’époque la plus noire qu’ait connu le foot français. Une place était à prendre dans le cœur des Français ! 2ème rendez vous manqué.

Euro 99, il se dispute en France et coïncide avec l’arrivée du premier Français en NBA, TAW. C’est certainement la plus grave erreur de la FFBB, alors que le pays surfait sur la vague de bonheur post Mondial 98, la fédé a été d’un amateurisme déconcertant. Aucune communication autour de l’événement (il y avait pourtant quelques joueurs NBA, Kukoc, Divac, Nesterovic, David, TAW …), aucun habillage autour des rencontres (pas de mascottes, danseuses, ni d’hymne nationale… froid !), aucune animation dans les villes qui accueillaient les rencontres, et le plus grave un contrat TV avec Pathé pour les premiers matchs, le grand public n’a donc assisté qu’aux défaites de l’équipe de France et n’a retenue que le divorce entre les bleus et son unique joueur NBA. 3éme rendez vous manqué.

Seul point positif de cet Euro, la qualification aux JO de Sydney, qui a permis de décrocher la fameuse médaille d’argent. Mais voilà, apparemment à la FFBB en juillet et Août on est en vacance et du coup il n’y a rien de prévu en cas de bonne performance en septembre aux JO. Et encore on a évité le pire, imaginez que les filles (qui méritaient plus que les garçons une médaille) ne soient pas tombées dans le traquenard coréen. 4ème rendez vous manqué.

Depuis l’an 2000, pas grand chose, juste deux coupes d’Europe pour les garçons de Limoges et Nancy (une de perdue avec Chalon), et un duel annuel entre l’USVO et Bourges au Final Four. Un titre de championnes d’Europe pour les filles en France. Deux autres joueurs en NBA Jérôme Moïso et surtout Tony Parker futur All Star. En gros trois fois rien. 5ème et malheureusement pas le dernier rendez vous manqué.

Alors pourquoi on en est là : plusieurs facteurs entrent en jeu.

Tout d’abord, l’esprit conservateur des dirigeants de nos instances au sens large (fédé, ligue, clubs). C’est leur sport, et les conseils ou la mise en avant de tiers ne sont pas les bienvenus. La défiance des présidents de clubs vis à vis de la possible arrivée de l’OM dans le basket en est un exemple.
L’absence de lobbying est également frappant, pourquoi des gens qui sont proches de notre sport n’ont jamais été mis en avant dans le cadre de sa promotion, je pense ici à Lionel Jospin, MC Solar, Yannick Noah, Jean-Jacques Goldman, Pascal Obispo (qui a quand même un BE basket), ou encore Georges Eddy, Bruno Poulain, et Thierry Bretagne qui travaillent pour des médias importants. Prenons l’exemple de la voile, si elle profite d’une exposition télévisuelle exceptionnelle, elle le doit en grande partie à des gens comme Kersauson, les frères Peyron ou Stéphane Tortora qui par le biais de leurs activités professionnelles font énormément pour la promotion de leur passion. Du coup on constate l’absence de joueur ou coach sur le devant de la scène médiatique. Les autres sports y arrivent bien, avec par exemple Jackson Richardson, Daniel Constantini, Olivier Magne, Fabien Pelous, Bernard Laporte, Thierry Rey, David Douillet, Roxana Maracineanu, Philippe Candeloro, Brahim Assloum, etc… Richard Dacoury, Greg Beugnot ou Tony Parker rempliraient parfaitement ce rôle.

De plus, le basket n’a pas SA grande compétition. On a pas LE grand rendez vous annuel. Les autres fédération ont cet événement qui sur un laps de temps très court permet de promouvoir leur discipline auprès du plus grand nombre, Le cyclisme a le tour de France, le rugby le tournoi des 6 nations, le tennis Roland Garros, la voile les grandes traversées type The Race, le golf la Ryder Cup etc… En cyclisme, un grand nombre de classiques vivent grâce à l’aura d’une course telle que le tour de France.
Pourquoi la FFBB n’a jamais essayé de mettre en place cet événement. Son Président, Monsieur Mainini, a pourtant était bien placé pour instaurer quelque chose au niveau européen, par exemple un tournoi des 8 nations (France, Espagne, Italie, Yougoslavie, Russie, Lituanie, Turquie, Grèce).

D’autre part, il y a une absence d’identité basket. Le hors série de Basketnews nous l’a démontré, notre histoire est riche. Pourquoi ce passé n’a jamais été mis en avant, le rugby par exemple l’a très bien fait. Ce sport, au travers de son histoire, véhicule une image de camaraderie, de fair play, de fête. Un exemple, qui pour certains peut paraître un détail, mais qui à mon sens a fait énormément pour l’image du rugby, la marque Eden Park. Créée par des joueurs du Racing, cette marque incarne complètement les valeurs du rugby et a séduit une population qui a priori n’avait aucun atome crochu avec ce sport et ses valeurs. Un sport qui était celui du Sud Ouest et du Massif Central a réussi, en mettant en avant ses valeurs, à séduire des cadres qui ont changé leur regard par rapport à cette discipline qui autrefois pouvait être perçue comme un sport pour footeux ratés qui ont un penchant pour la bouteille.
L’absence de communication sur les valeurs de notre sport fait que nos propres licenciés n’ont aucun sentiment d’appartenance. Ils jouent le week end pour le plaisir mais ils ne sentent pas concernés par le basket de haut niveau. Un exemple toujours en rapport avec le rugby, aller voir l’équipe de France est un honneur pour un rugbyman, se procurer les billets pour les matchs du XV de France n’est pas chose aisée loin de là. Une situation qui est loin d’être le cas pour notre équipe nationale.
Pourtant le basket a de nombreux atouts à faire valoir, il n’y a cas voir le nombre de spots publicitaires qui se servent de ce sport pour communiquer sur des produits souvent éloignés du basket en lui même (Citroën, IBM, Kodak, Golden Graham’s, etc…).

Enfin, la FFBB n’a jamais su aller au devant des néophytes. Le basket est un sport, qui contrairement au foot ou au hand, nécessite d’acquérir un minimum de bagages techniques afin de se faire plaisir dans le cadre de sa pratique. N’importe qui peut taper du pied dans un ballon ou le lancer dans un but avec la main. Le basket c’est un peu plus compliqué et ça peu en décourager certains. Il faut donc donner des bases aux enfants afin qu’ils puissent découvrir ce sport. En partant de ce constat une association marseillaise, dont je fais parti, a mis en place un programme auprès des enfants des écoles primaires. Ce programme repose sur 4 étapes :

Tout d’abord l’invitation de 5 000 enfants de CM1 et CM2 qui assistent à un match de basket pro, avec des animations autour de la rencontre notamment la présence d’une mascotte NBA, un show lumière et sonore, et des Pom Pom Girls. Suite à cette rencontre, un travail pédagogique sur le thème du basket est demandé à chaque classe. Les travaux passent devant un jury qui sélectionne les meilleurs (une trentaine de classes). Les lauréats bénéficient de 6 séances de 3 heures de basket encadrées par un BE qui permettent aux enfants d’acquérir les bases, ainsi que le gain de matériel destiné à la pratique du basket. Enfin un tournoi interclasses clôture ce programme. Cette action a eu un écho très favorable auprès du corps enseignant et des enfants. Malheureusement elle ne se renouvellera pas par manque de soutient de la FFBB par le biais de son comité. Le plus navrant dans cette histoire c’est que le projet avait été présenté à Monsieur De Vincenzi qui avait été séduit par cette action. Alors pourquoi la FFBB n’a pas cherché à reproduire ce programme dans d’autres comités, pourquoi ne met il pas en place des opérations de découverte du basket à destination des plus jeunes ?

Cependant, il faut reconnaître que la FFBB est très performante dans sa fonction première, qui est l’organisation des championnats amateurs, la formation des jeunes licenciés et des éducateurs dans les clubs. Preuve en est le nombre de nos joueurs qui évoluent dans les grands championnats étrangers, voir en NBA, et nos équipes de jeunes qui obtiennent d’excellents résultats sur la scène européenne.

En fait, le principal problème de la fédération se situe là, elle n’a pas su se remettre en question à l’heure où le sport, s’il veut être apprécié par le plus grand nombre, ne doit plus être traité comme un simple loisir mais comme un produit de consommation, la qualité du produit ne suffit plus, il faut savoir le vendre en élaborant une réelle stratégie marketing. Et pour cela, faut il encore s’en donner les moyens ! ! !.

- Article réalisé par Tourtoulou François pour Basket Info.